Ceci est mon blog d'origine, à consulter avec ses pendants : "Mes amis papillons" et la "Gazette des arts"

mercredi 16 novembre 2011

Ginkgo biloba

Nous nous sommes toujours débrouillés pour avoir chez nous, ou alors pas loin, un  Ginkgo biloba.  C’est un signe extérieur de longévité, et aussi de richesse,  puisqu’on l’appelle : «l’arbre aux quarante écus » ou même encore  «l’ arbre aux mille écus ». On sait qu’il s’agit de la plus ancienne famille d'arbres connue, puisqu'elle serait apparue il y a plus de 270 Millions d’années, quarante millions d'années avant l'apparition des dinosaures. Un arbre à 1 Km de l’épicentre de l’explosion atomique de Nagasaki a survécu. Le Ginkgo serait  potentiellement immortel. Il n'a pas de prédateurs naturels, ni parasites ou maladies. Le plus vieil arbre connu, celui du  jardin botanique de l'Université de Sendai, est âgé de 1 250 ans.


C’est un arbre d’origine chinoise, dans le sud-est plus précisément, dans les Monts Tianmushan. Il s'agit d'une espèce cultivée, la version sauvage ayant presque complètement disparu. De là, il arrive au Japon et en Corée aux alentours du XIIe siècle.

Engelbert Kaempfer, médecin et botaniste allemand séjourna au Japon de 1690 à 1692 en mission pour la Compagnie des Indes néerlandaises. Il fut le premier Européen à avoir fait une description de cet arbre dans son mémoire Amoenitatum exoticarum, publié en 1712.

Il rapporta des graines en Hollande et c’est dans le jardin botanique d’Utrecht que le premier Ginkgo européen aurait été semé en 1730.


En France, l’histoire ressemble à celle d’un album de Tintin et Milou se passant en Bretagne : un amateur français, le chevalier de Pétigny, achète à la fin du XVIIIe siècle les premiers pieds de Ginkgo pour la somme considérable de 200 livres, soit 40 écus d’or d'ou le nom de l'arbre aux 40 écus. Aujourd'hui, on estime que la plupart des vieux Gingko biloba qui poussent en France sont issus des arbres du chevalier de Pétigny dont la propriété de famille, le château de la Touche-Hersant (28200 LANNERAY) est toujours détenu par les descendants.

En chinois moderne, se prononce yín et signifie « argent », tandis que se prononce xìng et signifie « abricot ». Le composé 銀杏 se prononce alors yínxìng : « abricot d’argent ».

En japonais moderne, ces caractères chinois se prononcent ginnan ぎんなん, en réservant le plus souvent cette prononciation pour parler du fruit, tandis que l'arbre est nommé ichō (イチョウ).


Le nom biloba vient de la forme caractéristique des feuilles, fendues en deux lobes en forme de palmes et ne présentant pas de nervure centrale. Dotées d'un pétiole, elles sont insérées sur les rameaux par petits groupes de 3 ou 4 et atteignent de 5 à 15 cm de long. Ces feuilles sont caduques, deviennent jaune-doré à l’automne, formant comme un tapis d’or sous l’arbre : autre origine du nom de l’arbre aux mille écus. Nous en ramassons toujours en novembre, et il suffit de les insérer dans le Quo Vadis ; le carnet de chèques à défaut du Livre de Messe, pour avoir toujours des feuilles d’or porte-bonheur sous la main.


Les artistes fondateurs de l’Art Déco ont été impressionnés par cette forme et ce signe d’opulence, et nombreux ont façonné les ferrures des lampes Daum en reproduisant des feuilles bilobées.



Le Ginkgo biloba ne possède pas de graines, mais les individus mâles portent des chatons de forme cylindrique, et les femelles des ovules : les arbres sont donc sexués, on dit : dioïques. Un ovule fécondé par le pollen d'un autre plant de ginkgo mâle germera immédiatement, donnant naissance à une jeune pousse, généralement située au pied du plant mère.

Les arbres femelles produisent des ovules, couverts  d'un tégument de couleur jaune-brun, charnu extérieurement et coriace intérieurement, ce qui fait qu'on confond souvent cet ovule avec un fruit, notamment avec une drupe. L'ovule mesure de 2 à 3 cm de diamètre. Avant l'automne, il est lisse et attirant mais toxique, notamment la partie charnue du tégument, car elle contient de l'acide butanoïque. Ce dernier est à l'origine de l'odeur de beurre rance ou de vomissure que dégage l'ovule à l'automne lorsqu'il commence à se rider. La plaisanterie (très écolo) à l’époque du gros téléphone fixe et noir de Fernand Raynaud consistait à dévisser le micro du combiné, et à glisser dedans un ovule de Ginkgo. Peu après l’odeur rance dégoûtante se répandait partout, impossible de repérer l’origine, les coups de téléphone donnant une envie irrésistible de gerber comme on dirait aujourd’hui dans la langue des banlieues !  Maintenant que nous sommes à l’époque du politiquement correct, on a arraché le Ginkgo femelle du square Wilson à Toulouse, où nous faisions nos récoltes. On ne plante plus de femelles susceptibles d’être puantes, et on bouture des mâles garantissant l’absence d’odeur nauséabonde.

C’est bizarre, chez la gent masculine, ce serait plutôt le mâle qui sentirait mauvais !

Le Ginkgo biloba est l'arbre fétiche de la ville de Tokyo. Et aussi de Weimar, en Allemagne, où Goethe résida, et où il composa ce poème très d’actualité depuis que Nicolas et Angela deviennent inséparables au point de ne plus faire qu’un (ou une). L’avantage de l’Allemand est que les rimes sont respectées, ce qui n’est pas le cas de la traduction française :



Dieses Baums Blatt, der von Osten
Meinem Garten anvertraut,
Giebt geheimen Sinn zu kosten,
Wie's den Wissenden erbaut,

Ist es Ein lebendig Wesen,
Das sich in sich selbst getrennt?
Sind es zwei, die sich erlesen,
Daß man sie als Eines kennt?

Solche Frage zu erwiedern,
Fand ich wohl den rechten Sinn,
Fühlst du nicht an meinen Liedern,
Daß ich Eins und doppelt bin?
La feuille de cet arbre, qui, de l’Orient,
Est confiée à mon jardin,
Offre un sens caché
Qui charme l’initié.

Est-ce un être vivant,
Qui s’est scindé en lui-même,
Sont-ils deux qui se choisissent,
Si bien qu’on les prend pour un seul ?

Pour répondre à ces questions,
Je crois avoir la vraie manière :
Ne sens-tu pas, à mes chants,
Que je suis à la fois un et double ?




ça ce sont des coulemelles, pas loin du Ginkgo...

...Biloba...

...un ou double ?