« Un vignoble du Giennois », par l’abbé Bernard Gitton. Publié en 1943 par la société historique et archéologique du Giennois. Je suis aux toilettes, chez nos amis de la Loire. Leurs toilettes témoignent (comme à la maison) de l’activité intellectuelle intense des dits amis, puisqu’ils ont décidé d’anticiper leur immobilisation en cas de crue, en stockant dans les toilettes des quantités de (vieilles) revues, pour pouvoir occuper le temps en lisant…au cas où ? (la Loire inonderait la maison et donc les WC..).
Une maxime est répétée cent fois dans l’opuscule : « Vinearum affluentia uberrime redundat », de l’Abbé Fleury au XIè siècle. Il n’y a que des abbés pour vanter les vertus du vin vous observerez ! Comme l’a bien dit J. de Pesquidoux, dans les pages qui suivent, il s’agit là « d’aliment pour le corps et pour l’âme. L’homme a demandé au cep, dans son vin, le réconfort et le rafraichissement sous l’asstre à pic, (c’est écrit comme ça) les libres propos de la table amie, l’expansion et la joie du cœur à son foyer. Il lui a demandé parfois l’oubli, non point la déraison et la stupeur de l’ivresse… mais une griserie légère et sa fumée seulement. Il lui a demandé la gaillardise à toutes les luttes ; il a voulu les ouvrir au choc des verres. Enfin il lui a donné la place d’honneur aux festins de famille, chaque fois qu’il s’est engagé dans des liens, en particulier dans ceux du mariage, où les époux boivent pour la première fois dans la même coupe… Surtout, par le miracle eucharistique qui le transforme en sang du Christ, le vin est devenu, avec le pain, l’élément essentiel à l’acte religieux par excellence, et donc une chose sacrée ».
Je poursuis la lecture : « Aussi, quand après avoir promené avec complaisance son cours déjà fastueux entre les coteaux de Pouilly et les collines de Sancerre, le « fleuve de gloire » va faire son entrée dans le département du Loiret, ses rives quelque peu élevées se resserrent comme pour accueillir le souverain et solliciter ses munificences. A gauche comme à droite, à Beaulieu comme à Bonny et à Ousson, sur les pentes parfois abruptes, la vigne suspend ses somptueux festons : double guirlande qui escorte
Non procul a fluvio Ligeri, Castellio castrum Fertilibus florebat agris, cui flumen amoenum Hinc latus exornat, reliquum vineta coronant Guillaume le Breton | Non loin de Etait toute florissante au milieu de sa fertile campagne Tandis que d’un côté le fleuve lui apporte ses charmes Partout ailleurs les vignes la couronnent |
Ici, nous dégustons donc frais les petits vins bouquetés du Giennois. Ils ont le goût de pierre à fusil des cailloux des coteaux. Ils sont fruités, gais et généreux. Moins connus que les Sancerre, ils sont plus doux au portefeuille. On peut donc en boire avec prodigalité, même si les étiquettes nous avertissent comme d’habitude que la modération est conseillée par les règlements en vigueur, et qu’entre boire et conduire,
il faut boire, naturellement.